Cerveau : les seniors aussi fabriquent de nouveaux neurones Source : Futura Sciences par Marie-Céline RayJournaliste Publié le 09/04/2018 Une nouvelle étude montre que le cerveau continue à produire de nouveaux neurones dans l'hippocampe, même après 70 ans. Cependant, la plasticité neuronale diminue quand même avec l'âge. Continuons-nous à produire des neurones en vieillissant ? La question divise les chercheurs en neurosciences et cette nouvelle étude parue dans la revue Cell Stem Cell relance la controverse : d'après des chercheurs de l'université Columbia et de l'institut psychiatrique de l'État de New York, les personnes âgées fabriqueraient autant de nouveaux neurones que des personnes plus jeunes. Les chercheurs ont réalisé des autopsies de personnes âgées de 14 à 79 ans, décédées brutalement alors qu'elles étaient en bonne santé. Ils ont trouvé que même les cerveaux les plus âgés produisaient de nouvelles cellules. D'après les auteurs, la neurogenèse continue dans l'hippocampe à l'âge adulte, et même au cours du vieillissement, au-delà de 70 ans : les stocks de cellules progénitrices et de neurones immatures - qui se dénombraient en milliers - semblaient stables en dépit du vieillissement. Le saviez-vous ? Le gyrus denté est une partie de l'hippocampe qui produit des neurones. Ce processus pourrait jouer un rôle dans la mémoire et les apprentissages. Le volume du gyrus denté restait stable au fil du temps. En revanche, le nombre de cellules souches quiescentes diminuait dans le gyrus denté. Les cellules quiescentes sont des cellules souches qui semblent ne rien faire mais qui peuvent entrer en division. Voir aussi : Des fabriques de neurones à l'intérieur du cerveauDans un communiqué, Maura Boldrini, principale auteure de l'article, explique : « Nous avons constaté que les personnes âgées ont une capacité similaire à fabriquer des milliers de nouveaux neurones de l'hippocampe à partir de cellules progénitrices, comme le font les personnes plus jeunes. » Mais les personnes âgées forment tout de même moins de nouveaux vaisseaux sanguins et la neuroplasticité de leur cerveau décline. Cela signifie qu'elles auraient plus de difficultés à créer de nouvelles connexions entre neurones. Le cerveau des séniors continuerait à produire de nouveaux neurones, mais la plasticité neuronale serait moins bonne en vieillissant. © adimas, Fotolia La neurogenèse préservée au cours d'un vieillissement en bonne santéCes résultats contredisent ceux trouvés chez des animaux comme des rongeurs, dont l'hippocampe produit moins de cellules avec l'âge. Mais comme le rappelle dans The Guardian Maura Boldrini, « Il semble que les humains soient différents des souris - chez qui [la production de neurones] diminue très rapidement avec l'âge - et cela pourrait signifier que nous avons besoin de ces neurones pour nos capacités d'apprentissage complexes et nos réponses comportementales cognitives aux émotions. » Cela pourrait signifier que nous avons besoin de ces neurones pour nos capacités d'apprentissage complexesLe mois dernier, une autre étude parue dans Nature semblait plutôt montrer que les adultes ne fabriquaient plus de nouveaux neurones : l'article indiquait que la neurogenèse dans l'hippocampe diminuait rapidement chez les enfants, pendant les premières années de vie, pour atteindre des niveaux indétectables chez les adultes. Mercedes Paredes, de l'université de Californie San Francisco, qui était l'une des auteurs de cette étude, a maintenu : « Pour l'instant, nous ne pensons pas que cette nouvelle étude défie ce que nous avons conclu de nos propres observations publiées récemment : si la neurogenèse continue dans l'hippocampe humain adulte, c'est un phénomène extrêmement rare. » Le débat n'est donc pas clos. Ce qu'il faut retenirDes chercheurs ont réalisé des autopsies sur des adultes décédés brutalement alors qu'ils étaient en bonne santé. Leur cerveau contenait toujours des cellules progénitrices et des neurones immatures, indiquant que la neurogenèse fonctionnait bien, même après 70 ans. Ces résultats vont à l'encontre d'autres études suggérant que la neurogenèse est très réduite chez les adultes. Pour en savoir plus Non, le cerveau d'un senior n'est pas plus lent que celui d'un jeuneArticle de Janlou Chaput paru le 31 décembre 2011Pour certaines tâches, l'encéphale des seniors répond aussi vite que celui d'un adulte de 25 ans. S'ils paraissent plus lents, c'est qu'ils tournent leur langue sept fois dans leur bouche avant de parler... Tout savoir sur le cerveau grâce à notre dossier complet Le vieillissement s'accompagne de son lot de désagréments. Le physique répond moins bien, la douleur survient, la mémoire se perd... Mais toutes les aptitudes ne sont pas affectées de la même façon. « Pour des tâches cognitives simples, la vitesse de la prise de décisions et l'efficacité de la réponse restent intactes, même à 85 ou 90 ans » annonce Gail McKoon, professeur à l'université d'Ohio (États-Unis) et l'un des auteurs d'une étude publiée dans Cognitive Psychology. C'est la conclusion d'une étude des capacités cognitives des personnes âgées par rapport à celles de jeunes adultes. Les participants, hommes et femmes, se classaient en trois classes d'âge : une vingtaine d'années, 60-74 ans (les seniors) et 75-90 ans (les doyens). Il s'agissait de comparer les vitesses et l'efficacité des réponses données à deux tests différents. Ces deux données - rapidité et taux de réussite - sont fondamentales car de nombreuses études ne se préoccupent que de la vélocité sans prendre en compte la qualité des réponses. Or, dans ce cas, il ne s'agit que d'une question de réflexes et non de réflexion. Encourager les seniors pour améliorer leurs performancesLe premier exercice consistait à voir s'afficher sur un écran une certaine quantité d'astérisques. Il fallait répondre le plus vite possible s'il y avait entre 1 et 50 petites étoiles, ou s'il y en avait plutôt entre 51 et 100. Le second test se déroulait de la façon suivante : une suite de lettres apparaissait et les sujets devaient alors dire si elles formaient un mot ou pas. Le cerveau, ici visionné grâce à une tomographie à émission de positons, se construit au fil de la vie. Si les neurones meurent avec l'âge, ce qui cause un déclin dans les performances, toutes les facultés intellectuelles ne sont pas affectées de la même façon. Par exemple, les connaissances générales sont plus importantes à 60 ans qu'à 30. Mais la mémoire, en revanche, l'est souvent moins. © Jens Langner, DP Qu'en est-il ressorti ? Les jeunes se sont montrés les plus véloces, devant les seniors du troisième âge, talonnés par les doyens. La conclusion parait évidente : on constate un déclin dans les capacités de réflexion avec l'âge. Pourtant, les auteurs sont allés un peu plus loin dans l'analyse. Lors d'une étude précédente, ils avaient encouragé des personnes âgées à répondre le plus vite possible à ces mêmes petites expériences. Dans ce cas, les résultats se sont uniformisés avec les performances des individus les plus jeunes, preuve que l'âge ne ralentit pas toujours le fonctionnement du cerveau. Toutes les capacités du cerveau ne déclinent pasIl semble donc que les délais plus longs constatés dans cette première expérience citée soit le fruit d'une crainte plus importante de se tromper. La fameuse sagesse des anciens peut-être... « La plupart des gens pensent qu'il est naturel que le cerveau des personnes âgées ralentisse avec l'âge, mais nos résultats montrent que ce n'est pas vrai à tous les niveaux, déclare Roger Ratcliff, co-auteur de l'étude. Au moins dans certaines situations, les septuagénaires peuvent avoir des temps de réponses similaires aux adultes de 25 ans. »Dans une autre étude, Ratcliff et ses collègues ont montré en revanche que cette même capacité s'acquiert avec l'âge. Plus un enfant est jeune et plus il prendra de temps pour bien répondre à l'exercice demandé. Il faut donc une certaine maturité cérébrale avant d'optimiser ses performances dans ce genre de tâche. Mais ce n'est pas l'âge avançant qui va les réduire à néant. Cela vous intéressera aussi Interview : peut-on numériser la conscience ? La science fonctionne souvent par biomimétisme, c'est-à-dire en s'inspirant du vivant. Numériser la conscience humaine est donc une étape logique dans la création d'une intelligence artificielle censée simuler ou outrepasser nos capacités. Futura-Sciences a rencontré Jean-Claude Heudin, directeur du laboratoire de recherche de l'IIM (Institut de l'Internet et du multimédia) afin de comprendre les difficultés d'une telle entreprise. Liens externes Cognitive Psychology Children Are Not Like Older Adults: A Diffusion Model Analysis of Developmental Changes in Speeded Responses Human Hippocampal Neurogenesis Persists throughout Aging À voir aussi : qi cerveau | cerveau | cerveau en 3d | eau au cerveau | cerveau souris | cerveau droit cerveau gauche | medecine cerveau | cerveau 100 | tpe sur cerveau | tpe cerveau Retrouvez les commentaires dans notre forum.